Comprendre avant d’agir. Agir quand ça compte.
Le 28 septembre, les Suissesses et les Suisses voteront sur l’introduction d’une identité électronique officielle, l’e-ID.
Un objet en apparence technique, mais qui touche à quelque chose de fondamental : la confiance.
Car au fond, l’e-ID n’est pas qu’une carte digitale. C’est la porte d’entrée d’un nouveau rapport entre citoyens, institutions et économie. Et selon la manière dont nous l’ouvrons, cette porte peut déboucher sur un couloir éclairé… ou sur un cul-de-sac.
Pourquoi une e-ID ?
Dans un monde où les démarches administratives se digitalisent, l’absence d’une identité numérique reconnue par l’État fait de la Suisse une anomalie.
Partout autour de nous, des solutions existent déjà :
- l’Estonie a fait de son e-ID un véritable passeport numérique pour accéder à plus de 600 services publics et privés ;
- l’Allemagne, malgré ses lourdeurs, a mis en place une carte nationale permettant certaines démarches ;
- même l’UE développe un portefeuille d’identité numérique interopérable.
Pour les entreprises comme pour les administrations suisses, l’absence d’un système fiable se traduit par :
- une complexité accrue dans la vérification des identités,
- une perte de compétitivité face aux pays voisins,
- et une dépendance croissante à des solutions privées (souvent étrangères).
Bref, sans e-ID, nous restons coincés dans le XXe siècle.
Les risques d’un faux départ
Mais il serait naïf de croire que voter « oui » suffit.
Une e-ID mal conçue peut se transformer en fiasco politique et technologique.
Trois risques majeurs guettent :
- Le déficit de confiance. La tentative avortée de 2021 en a fait la démonstration: si les citoyens perçoivent l’e-ID comme un outil contrôlé par des acteurs privés ou comme une menace pour leurs données, le rejet est immédiat.Or, sans adoption massive, une identité numérique ne sert à rien.
- La sécurité des données. Une base de données centralisée mal protégée, c’est la promesse d’un jackpot pour les cybercriminels. Le moindre incident suffirait à réduire à néant la confiance durement acquise.
- La fracture numérique. Si l’e-ID devient un passage obligé pour accéder aux services publics, il faut s’assurer que chaque citoyen puisse l’utiliser. Sinon, on crée une inégalité démocratique intolérable entre les « inclus » et les « exclus » du numérique.
Ce qu’il faut faire pour réussir (à notre avis)
Alors, que faut-il mettre en place pour que l’e-ID devienne un atout stratégique pour la Suisse ?
1. Transparence totale sur la gouvernance
Qui contrôle les données ? Quels sont les garde-fous ? Comment sont-elles stockées et utilisées ?
Le citoyen doit savoir, noir sur blanc, où vont ses informations.
2. Un modèle de sécurité robuste
L’e-ID doit reposer sur des standards de cybersécurité les plus élevés, testés par des audits indépendants.
Un seul mot d’ordre : zéro tolérance pour les failles.
3. Une approche inclusive
Pas question de laisser de côté les personnes âgées, les zones rurales ou les citoyens moins à l’aise avec le numérique. L’e-ID doit être pensée avec des alternatives accessibles et un accompagnement clair.
4. Une communication pédagogique
Le succès de l’Estonie n’est pas seulement technologique. C’est avant tout une question de communication : expliquer simplement, montrer les avantages concrets, prouver que la vie devient plus facile.
La souveraineté numérique, en arrière-plan
Ce débat sur l’e-ID s’inscrit dans un enjeu plus large : celui de la souveraineté numérique.
Car derrière une carte digitale se cache une question politique cruciale :
Voulons-nous que l’identité numérique des Suisses soit hébergée et contrôlée par nous-mêmes, ou par d’autres ?
Si la Suisse rate ce virage, elle se condamne à dépendre encore davantage de solutions étrangères.
Mais si elle réussit, elle pose la première pierre d’un écosystème numérique souverain, compétitif et digne de confiance.
Conclusion
L’e-ID est une chance. Mais une chance fragile.
Sans confiance, elle restera un gadget administratif.
Avec confiance, elle peut devenir un levier puissant pour renforcer la démocratie, simplifier la vie des citoyens et moderniser l’économie.
La balle est dans notre camp. Le 28 septembre, les Suissesses et les Suisses diront s’ils veulent franchir cette étape.
Mais la vraie question commence après : aurons-nous le courage de construire un modèle qui inspire confiance, et pas seulement qui coche une case ?
👉 Et vous, quels garde-fous jugeriez-vous indispensables pour que l’e-ID soit un succès ?
Discutez-en avec nous sur LinkedIn.
