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Droits de douane et perspectives économiques suisses

Droits de douane et perspectives économiques suisses

Lundi, 16 Juin 2025

Date : 16 juin 2025

Introduction – Chez Impakt Nexus, nous appliquons une « analyse fine des enjeux politiques, sociaux et économiques » pour éclairer nos clients. Dans le contexte de tensions commerciales croissantes, nous commentons ici les perspectives économiques suisses évoquées par l’Agefi dans son article du jour, et débattons du risque d’un « retour de manivelle » du côté des droits de douane. Les prévisions officielles restent très attentistes : le Secrétariat d’État à l’Économie (SECO) table sur un PIB de +1,3% en 2025 et +1,2% en 2026, à peine révisé à la baisse , tandis que le KOF de l’ETH Zurich prévoit +1,4% en 2025 et seulement +1,5% en 2026 (contre 1,9% auparavant) . Cette prudence reflète l’avertissement général du KOF : « la guerre commerciale internationale s’avère plus intense encore qu’envisagé au printemps et vient perturber plus profondément encore les estimations conjoncturelles » .

Enjeux conjoncturels et ajustements prévus

Les anticipations de croissance modérées intègrent en partie l’effet « boomerang » lié aux taxes américaines sur les importations suisses. En effet, l’économie helvétique avait enregistré un premier trimestre 2025 soutenu par des achats préventifs en vue des droits de douane annoncés par la Maison-Blanche. Or l’activation de ces droits (31% sur les biens suisses annoncés en avril 2025 ) fait désormais craindre un contrecoup. Comme le souligne l’Agefi, « l’économie helvétique s’apprête à affronter un effet retour du mouvement d’anticipation » qui a stimulé la demande au premier trimestre . En pratique, cela a conduit la SECO à abaisser légèrement ses prévisions (+1,3% vs +1,4%) et à assombrir nettement ses attentes pour 2026 (+1,2%) . Le scénario privilégié du KOF suppose pour sa part des droits forfaitaires de 10% sur la plupart des importations américaines (avec exemption notable des produits pharmaceutiques) . Si les mesures effectives s’avéraient plus sévères que ce scénario (Trump avait évoqué jusqu’à 31%), la réalité économique suisse pourrait donc se révéler plus dégradée que les modèles officiels ne l’anticipent.

Impact sectoriel des droits de douane

Les répercussions varient fortement selon les secteurs. D’après economiesuisse, les industries exportatrices suisses – notamment la chimie/pharma et l’horlogerie – « pourraient fortement pâtir » des nouveaux droits américains . En détail :

  • Pharmaceutique et chimie :  la moitié environ des exportations vers les États-Unis provient du secteur pharma-chimie (31 milliards CHF sur 65 Md CHF au total) . Le plan américain exclut pour l’instant les médicaments, ce qui limite l’onde de choc immédiate, mais une enquête sur les produits pharmaceutiques est envisagée .
  • Horlogerie de luxe : les montres représentent ~20% des ventes horlogères aux USA . Les analystes prévoient que des surtaxes de 31% vont pénaliser la demande outre-Atlantique, obligeant les marques à hausser les prix ou à absorber les pertes. En somme, les exportations horlogères suisses devraient fortement ralentir.
  • Machinerie et équipements : machines-outils, équipements électriques et produits métalliques helvétiques pourraient voir des pertes de l’ordre de 1–2 milliards CHF sur les marchés américains . Ce secteur est particulièrement exposé puisqu’il se diversifie peu hors de l’UE et des États-Unis (qui représentent 15% de son chiffre d’affaires) .
  • Agroalimentaire : le chocolat (deuxième marché mondial aux USA) et d’autres denrées (fromages, vins) pâtiront de l’effet prix. Par exemple, l’exportation de chocolat en direction des États-Unis (605 millions CHF en 2024) pourrait chuter de près de 20% sous le nouveau tarif .

Les pronostics sectoriels soulignent en somme que, hors secteur pharmaceutique (relativement protégé), l’onde de choc sera bien concrète, voire brutale, pour de nombreuses PME exportatrices suisses.

Limites des prévisions et incertitudes

Les prévisions actuelles possèdent des limites importantes. D’une part, elles reposent sur des hypothèses d’escalade modérée (droits de 10%, sans remise en cause majeure des accords existants) . Les annonces plus dures de la partie américaine (31% au lieu des 20% prévus pour l’UE) suggèrent que l’impact pourrait être plus élevé que prévu. D’autre part, l’environnement global demeure incertain : au ralentissement attendu de la demande extérieure viennent s’ajouter une inflation tenace, des taux d’intérêt élevés et des tensions géopolitiques (commerce sino-américain, guerre en Ukraine, etc.). Les modèles conjoncturels traditionnels (SECO, KOF) peuvent donc sous-estimer ces risques de moyen terme. En pratique, cela renforce la nécessité pour les entreprises et les pouvoirs publics de prévoir différents scénarios (fromage blanche, choc durable, etc.) et de ne pas considérer les chiffres de croissance projetés comme immuables.

Ouverture stratégique – se positionner pour l’avenir

Face à ce panorama délicat, les acteurs économiques suisses gagneraient à diversifier leurs options et à renforcer leur résilience. Par exemple, la fédération Swissmem encourage dès maintenant les exportateurs de machinerie et de technologies à se tourner vers d’autres marchés (UE, Inde, Asie du Sud-Est, Amérique latine, Chine) pour compenser la baisse des ventes aux États-Unis . De façon générale, les stratégies suivantes peuvent aider :

  • Développer de nouveaux débouchés hors USA et renforcer la part de marché dans l’UE (où une légère croissance est encore attendue) ; dans cette perspective, les débats internes sur l'initiative populaire "NON à une Suisse à 10 millions" et sur les Accords bilatéraux III seront déterminants.
  • Miser sur les secteurs porteurs domestiques et régionaux (services, numérique, R&D pharmaceutique), afin de ne pas dépendre d’un seul grand marché exportateur.
  • Améliorer la compétitivité interne (innovation, formation, flexibilité salariale) pour amortir l’effet tarifaire.
  • Multiplier les analyses de risques géopolitiques et scénarios économiques (« early warning ») afin d’anticiper d’éventuelles mesures de rétorsion ou de nouveaux chocs externes.

Conclusion  La conjoncture suisse reste relativement robuste au premier abord, mais le spectre d’un resserrement commercial impose vigilance et préparation. Comme le résume notre commentaire, « le retour de manivelle commercial n’aura rien d’abstrait pour les PME suisses » : il s’agit d’un défi concret. Les décideurs publics et les entreprises doivent dès maintenant adapter leur stratégie pour transformer ce contexte adverse en opportunité de diversification et d’innovation.

Sources – analyses et données issues de rapports économiques et médias (SECO, KOF, Economiesuisse, media spécialisés).

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